Les préjudices subis par les tiers vendeurs sur Amazon France en raison des pratiques anticoncurrentielles d’Amazon
Les tiers vendeurs (en anglais, « third-party sellers ») proposant leurs produits sur Amazon France ont subi des préjudices résultant des pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre par Amazon leur ouvrant droit à réparation.
Ces préjudices résultent du fait, d’une part, que ces pratiques anticoncurrentielles ont affecté négativement les volumes de ventes des tiers vendeurs sur sa marketplace. D’autre part, elles ont conduit à une hausse des prix des services logistiques au détriment des tiers vendeurs, qu’ils soient fournis par Amazon ou par un autre prestataire.
Les pratiques anticoncurrentielles d’Amazon ont conduit à une diminution des volumes des ventes des tiers vendeurs
Les tiers vendeurs ont subi un premier préjudice résultant des pratiques d’auto-favoritisme d’Amazon en faveur de son propre service de vente directe.
En effet, il est utile de rappeler qu’Amazon opère sur le marché avec une double casquette.
D’une part, Amazon intervient en tant que marketplace. Contrairement à un site e-commerce traditionnel qui vend uniquement ses propres produits, une marketplace agit comme intermédiaire entre les acheteurs et les vendeurs. La plateforme d’Amazon permet donc aux tiers vendeurs de proposer leurs produits aux consommateurs.
D’autre part, Amazon dispose sur sa plateforme de son propre service de vente directe, Amazon Retail. Pour les besoins de ce service, Amazon achète des produits à des vendeurs (« first-party sellers ») pour ensuite les revendre aux clients finaux.
Or, dans le cadre de son activité de marketplace, Amazon récolte des données non publiques des tiers vendeurs et les utilisent pour favoriser son service Amazon Retail.[1]
En particulier, Amazon se sert de ces données pour déterminer sa stratégie commerciale, notamment pour la fixation de ses prix de vente et la gestion de ses stocks.[2]
Le fait d’avoir accès et de pouvoir exploiter des informations sensibles concernant les activités des tiers vendeurs accorde donc à Amazon un avantage concurrentiel indu lui permettant d’augmenter ses volumes de vente par rapport à ceux des tiers vendeurs.
En l’absence de cette pratique d’Amazon, les tiers vendeurs auraient vendu plus de produits et donc généré des recettes plus élevées.
Par conséquent, les tiers vendeurs sont en droit de demander une indemnisation équivalente aux volumes de vente qu’ils n’ont pas réalisés en raison du comportement anticoncurrentiel d’Amazon.
Les pratiques abusives d’Amazon ont augmenté les prix des services logistiques pour les tiers vendeurs
Les préjudices subis par les tiers vendeurs résultent également des abus de position dominante mis en œuvre par Amazon dans le cadre du fonctionnement, d’une part, de la Buy Box et, d’autre part, du label Prime.
Les pratiques d’Amazon relatives à la Buy Box
La Buy Box est l’encadré situé sur la page d’un produit, où les clients peuvent cliquer sur « Ajouter au panier » ou « Acheter maintenant ».[3]
La Buy Box est essentielle pour les vendeurs, car la majorité des ventes passent par cet emplacement.[4]
Selon l’autorité de la concurrence britannique (Competition Market Authority), plus de 75% des achats sont effectués par la Buy Box.[5]
Or, dans la sélection des offres à afficher dans la Buy Box, Amazon privilégie les tiers vendeurs utilisant les services logistiques qu’il propose (« Fulfilment by Amazon» ou « FBA »).
Par conséquent, les produits liés à l’utilisation des services FBA bénéficient d’une meilleure visibilité et de chances de vente plus importantes.
Pour atteindre des meilleurs résultats de vente, les tiers vendeurs sont donc très fortement incités à utiliser des services logistiques FBA.
D’une part, l’augmentation de la demande des services FBA entraîne une augmentation de leurs prix, qui n’auraient pas eu lieu en l’absence du comportement abusif d’Amazon.[6]
D’autre part, cette augmentation des prix FBA engendre l’augmentation des prix des services logistiques proposés par d’autres prestataires (« Fulfilment by Merchant » ou « FBM »).[7] En effet, en raison des pratiques d’Amazon, les prestataires FBM ne peuvent pas bénéficier de ce que l’on appelle des « économies d’échelle ».9 Les économies d’échelle désignent la réduction du coût de production lorsqu’une entreprise augmente la quantité produite. Cela dépend d’une meilleure répartition des coûts fixes.
En raison des pratiques anticoncurrentielles d’Amazon, les tiers vendeurs sont de plus en plus amenés à utiliser des services logistiques FBA et en raison d’une réduction du nombre de leurs clients, les prestataires FBM ne peuvent pas réaliser d’économies d’échelle, ce qui les amènent à augmenter les prix de leurs services pour rester viables.
Les tiers vendeurs ont donc subi un préjudice résultant des prix excessifs qu’ils ont payés pour l’utilisation de services logistiques, tant FBA que FBM.
Les pratiques d’Amazon relatives au label Prime
L’augmentation des prix subie par les tiers vendeurs est exacerbée par les pratiques d’Amazon liées au label Prime.
Le label Prime indique qu’un produit bénéficie des avantages du programme Amazon Prime, tels qu’une livraison rapide et gratuite pour ses abonnés. [8]
Les avantages liés au label Prime entraînent un impact positif sur les ventes des produits bénéficiant de ce label. En effet, les utilisateurs du programme Prime ont progressivement augmenté depuis son lancement.[9]
En déterminant les bénéficiaires du label Prime, Amazon pratique de l’auto-favoritisme conduisant à une hausse supplémentaire des prix pour les services logistiques.
En effet, d’une part, Amazon réserve l’accès au label Prime aux produits vendus par des tiers vendeurs utilisant des services logistiques FBA.[10] D’autre part, l’obtention du label Prime est l’un des critères pour l’attribution d’une place dans la Buy Box.[11]
Par conséquent, les tiers vendeurs sont davantage incités à utiliser des services logistiques FBA pour obtenir le label Prime, en vue de gagner une place dans la Buy Box.
Les abus d’Amazon portant sur le label Prime, tout comme ceux portant sur la Buy Box, entraînent donc une augmentation supplémentaire des prix des services logistiques.
Il en découle que les tiers vendeurs sont en droit d’obtenir une indemnisation pour les frais excessifs payés pour les services logistiques en raison des pratiques anticoncurrentielles d’Amazon.
Si vous êtes ou avez été tiers vendeur sur Amazon France depuis 2017, n’hésitez pas à nous contacter sur le formulaire dédié ou en nous écrivant à mbarennes@geradinpartners.com, sans engagement et sans frais, pour recevoir une première évaluation du montant de l’indemnisation que vous seriez susceptible d’obtenir.
[1] Voir en ce sens la décision du CAT, Stephan v BIRA (v Amazon), [2025] CAT 6, pt. 26.
[2] Voir en ce sens la décision de la Commission européenne du 20 décembre 2022, AT.40462 – Amazon Marketplace et AT.40703 – Amazon Buy Box, pt. 116-120 (disponible ici).
[3] Voir la décision de la Commission européenne du 20 décembre 2022, AT.40462 – Amazon Marketplace et AT.40703 – Amazon Buy Box, pt. 36 (disponible ici).
[4] Ibid., pt. 125.
[5] CAT, Stephan v BIRA (v Amazon), [2025] CAT 6, pt. 7.
[6] Voir en ce sens la décision du CAT, Stephan v BIRA (v Amazon), [2025] CAT 6, pt. 27.
[7] Ibid.
[8] Voir la décision de la Commission européenne du 20 décembre 2022, AT.40462 – Amazon Marketplace et AT.40703 – Amazon Buy Box, pt. 138 (disponible ici).
[9] Ibid., pt. 139.
[10] Voir en ce sens la décision du CAT, Stephan v BIRA (v Amazon), [2025] CAT 6, pt. 26.
[11] Voir la décision de la Commission européenne du 20 décembre 2022, AT.40462 – Amazon Marketplace et AT.40703 – Amazon Buy Box, pt. 141 (disponible ici).